Histoire des chiens dans la guerre

Ilustration : Huge


" Le premier art de l'homme a été l'éducation du chien et le fruit de cet art la conquête paisible du monde " écrivit l'éminent naturaliste français Georges Louis Buffon au 18eme siècle. A bien y regarder, les choses ne se sont pas vraiment passées comme ça. En effet, depuis l'antiquité les chiens ont été de presque toutes les guerres.

 

Préhistoire:

Les préhistoriens indiquent que durant cette période, les chiens servirent comme chasseurs pour rabattre et prendre le gibier. Egalement on les mangea (au moins la viande des chiots), on se servit également de leurs os, de leur peau et de leurs dents. Il est établi qu'ils furent utilisé aussi à la défense des campements. Mais rien n'atteste de leur éventuelle participation à des conflits intercommunautaires.

 

Antiquité:

C'est durant l'Antiquité, que plusieurs peuples se rendîrent compte de tous le profits qu'ils pourraient tirer à des fins militaires d'un animal aussi soumis à leur volonté et qui pouvait se montrer si féroce. C'est chez les Assyriens que l'engagement direct de dogues dans les batailles commença. Puis cette pratique se répandit chez presque tous les peuples. Les chiens des Gaulois, des Celtes, des Cimbres épouvantaient les légions romaines. On rencontre des chiens de guerre chez les Egyptiens, les Sumériens, les Grecs, dans les armées de Cyrus, puis d'Alexandre le Grand qui utilisa des Dogues du Tibet, animaux extrêmement agressifs et dont la race existe toujours. Les armées romaines employèrent des chiens porteurs de feu grégeois dans des vases pour provoquer des incendies chez l'ennemi. On les dressa également à cette époque à achever les blessés à la fin des batailles.

 

Moyen-âge:

L'utilisation principale du chien à cette époque fût la chasse, mais ces animaux frequentèrent aussi sur les champs de bataille avec pratiquement les mêmes fonctions que durant l'antiquité. On les munit parfois de colliers à pointes de fer et harnachés de cuirasses sur lesquelles étaient fixées des lames d'acier avec lesquels ils étaient chargés d' éventrer des chevaux.

 

Renaissance:

La carrière martiale des chiens se poursuivit au 16 ème siècle. Henri VIII d'Angleterre doit sa victoire sur Charles Quint à sa phalange de plus de 500 dogues qui fondirent sur l'armée de cet empereur. De manière générale, jusqu'à la révolution française, des dogues lourds sont entrés en action lors d'assauts au cours de nombreuses batailles.

L'emploi de ces chiens guerriers atteignit son apogée lors de la conquête des Caraïbes et de l'Amérique centrale et du sud par les espagnols. En effet, les "perros de sangre"(chiens de sang) qui étaient des croisements de dogues et de mâtins ont largement contribué à l'anéantissement des empires inca, maya et aztèque. Les espagnols dressaient leurs chiens à déchiqueter les prisonniers indiens, ils prenaient également part aux affrontement et aux poursuites. Leur férocité et leurs aboiements épouvantaient les Indiens qui ne connaissaient, avant l'arrivée des conquistadores que des chiens de petite taille et aboyant rarement. Becerillo un chien espagnol particulièrement féroce recevait la paye de deux soldats, ce qui n'est pas un très bon signe de la santé mentale au sein de l'armée espagnole de cette époque. Il est permis de penser que sans ces animaux, les espagnols n'auraient pas conquis aussi facilement ce continent.

 

Epoque moderne:

Au fil des siècles, les chiens furent de moins en moins utilisés pour l'assaut. Quelques armées, dont celle de Philippe V d'Espagne, commencèrent à les employer comme éclaireurs, tandis que Frédéric le Grand, roi de Prusse, les utilisait au transport du courrier pendant la guerre de Sept Ans. A partir de l'époque moderne on garda un certain nombre de chiens à des fonctions de sentinelles, mais des armes nouvelles étant apparues leur efficacité dans les combats diminua. Ils ne servirent plus qu'épisodiquement à des actions de capture ou de basse police. Moustache fut le plus célèbre de tous les chiens de régiment. C'était le barbet (ancêtre du caniche) qui accompagnait Napoléon Bonaparte à Marengo en 1800 et, quelques années plus tard, Napoléon à Austerlitz. A la fin de cette bataille, il fut décoré par le maréchal Lannes pour avoir, après la mort d'un porte-drapeau, ramené les "lambeaux de l'étendard" dans les lignes françaises. On voit que dans les armées de Napoléon l'absurdité régnait tout autant que dans l' armée espagnole de la conquête de l'Amérique.

 

Histoire contemporaine:

Dans les guerres contemporaines, les chiens furent utilisés à de nombreuses tâches : la détection des mines, la détection de l'ennemi, comme chiens de pistage, ainsi que comme chiens de liaisons, de recherche de blessés et enfin de défense civile. Egalement chargés de découvrir les bombes à retardement ou les victimes dans les décombres. Durant la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis et l'Allemagne furent grands consommateurs de chiens militaires. Les Etats-Unis dressèrent près de 40 000 chiens dès leur entrée en guerre, dont 85% étaient des chiens d'attaque et des chiens-sentinelles. Puis, très vite, une association patriotique : " dogs for defence " mit 125 000 chiens à la disposition de l'armée américaine. Sur le front du Pacifique, ils servirent d'éclaireurs aux " Marines " et furent utilisés également la détection de l'ennemi.

Les Allemand étaient très amateurs de chiens militaires. Ils furent environ 500 000 durant la seconde guerre mondiale qui avaient été soigneusement recensés. Chaque animal possédait sa fiche individuelle, sur laquelle figuraient ses capacités et sa catégorie d'emploi. Parmi ces chiens, 120 000 étaient destinés à la Wehrmacht et 30 000 à la police allemande. Ces derniers participaient à la recherche des agents alliés parachutés et des aviateurs abattus. Aux frontières, ils permettaient l'arrestation des évadés. Les sociétés canines civiles étaient en relation étroite avec l'armée pour la vente des chiens, surtout de bergers allemands mais également de dobermans, de rottweilers ainsi que d'airedales. Leur prix moyen était fixé par l'autorité militaire chaque année. Les chiens étaient dressés dans des chenils militaires. L'armée allemande les utilisa aux basses oeuvres du IIIème Reich : surveillance dans les camps et répression contre les prisonniers. Ils jouèrent les rôles les plus variés dans les armées hitlériennes, des campagnes d'Afrique aux camps de la mort. L'Allemagne en offrit plusieurs milliers à ses alliés, à l'Italie, et le Japon.



Le berger allemand

 

Répression :

Le chien a également montré ses talents dans toutes les répressions, guerres coloniales où impérialistes. En effet, on retrouve celui-ci agissant pour récuperer, les esclaves en fuite pendant la guerre de sécession. pour conquérir l'Australie, on lança des dogues contre les aborigènes. En Afrique du Sud, les boerbulls furent très actifs pendant la ségrégation raciale en tant que Riot dogs. Enfin pour ne citer qu'eux - la liste serait beaucoup trop longue et monotone si nous l'avions voulue exhaustive - les indépendantistes d'Haïti, les prisonniers évadés des camps durant la seconde guerre mondiale, les combattants algériens contre la France, ou les vietnamiens contre les Etats-Unis, tous furent traqués par des meutes. De plus, comble de l'horreur putschisto-canine dans le Chili de Pinochet, des chiens dressés violèrent des opposantes politiques.

Les images prises en Irak dans la désormais célèbre prison d'Abou Ghraib montrent que le chien est toujours l'animal favori des tortionnaires. Il est présent sur presque chaque photo, ce qui semble suggérer que sans lui il n'y a pas de séance de torture vraiment réussie.

 

Conclusion :

Le chien n'est pas le meilleur ami de l'homme en général, mais le meilleur ami du militaire, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Quant à la saillie de Buffon sur la conquête pacifique du monde qui aurait résulté de l'apprivoisement du chien, on ne comprend, après ces lignes, plus très bien à quoi elle peut bien faire allusion.

 

On notera aussi qu'en France le chien prêta main forte aux hommes pour exterminer le loup, et il fît si bien son travail que le loup finit par disparaître. Le chien, ce prédateur carnivore descendant du loup et génétiquement resté si proche de lui a aidé à sa disparition. On ne peut qu'être frappé par le pareil comportement d'une espèce, objectivement collaboratrice, qui se vendît contre son ancêtre à l'homme pour quelques caresses et un morceau de pain rassi.